Revue de presse

25.03.2013

Il appartient à la classe moyenne d'éviter la bulle

Supprimer les déductions fiscales pour les propriétaires? Le FMI pousse la Suisse dans ce sens. Une motion interpartis tente d'adoucir le sort de la classeme moyenne.

L'accès  à la propriété se resserre de plus en plus. Aux 10% de fonds propres qu'il convient de verser de sa poche, ainsi   que  l'a imposél'Association suisse des banquiers depuis juillet der­nier pour réduire le recours au 2e pilier, est venue s'ajouter une autre mesure destinée à renvoyer l'aspirant proprié­taire à ses loyers mensuels. En février, la FINMA (Autorité de surveillance des marchés) a imposé aux banques d'aug­menter  de 1% leurs fonds propres par rapport aux crédits hypothécaires qu'elles octroient. Conséquence, nombre d'établissements élaborent des plans de financement basé sur 30% de fonds  propres, en demandant par ailleurs des garanties de solvabilité au cas où le taux passerait à 5%, plus 1%de frais d'entretien et  1% d'amortissement. Des barrières dissuasives, mais encore insuffisantes aux yeux du Fonds monétaire international (FMI). Lors de sa visite annuelle, la délégation a notamment pointé lundi dernier ce qu'elle nomme une «contradiction» de la Suisse, qui d'une part multiplie les freins à l'endettement hypothécaire, et d'autre part incite les particuliers à devenir propriétaires par le biais d'abattements fiscaux (déduction des hypo­thèques).

Suisse surendettée

Un surcroît de cohérence signifierait-il la suppression de ces avantages? Selon les conclusions  de son rapport, le FMI préconise la suppression de la valeur locative et de la déduction des coûts de financement, pratiques qui, juge-t-il, incitent  les gens à prendre trop de risques. «Sur le fond   de l'analyse, la Suisse est d'accord, mais, en revanche, elle diverges sur les moyens à mettre en œuvre, précise Anne Césard, porte­-parole du Secrétariat d'Etat aux ques­tions financières internationales (SFI). On ne peut  toucher aux articles 108 et 111 de la Constitution sur l'accès au logement sans déclencher un proces­sus démocratique qui peut durer deux ou trois ans». Or le temps presse. Avec 637 milliards de francs  de crédits hypothécaires, soit plus que le PIB (590 milliards), la Suisse est cham pionne  de l'endettement. Une ten­dance qui s'est encore accrue ces trois dernières années avec la hausse du prix des objets immnobiliers. Le moment où jamais pour calmer le marché, avant qu'une bulle n'éclate et que les prix ne s'effondrent, estime le FMI.

Ne pas pénaliser les familles

A la classe moyenne donc d'enrayer une éventuelle bulle immobilière en acceptant des conditions très onéreuses. Ou en renonçant à la propriété. Une fatalité que refuse la Fédération  romande immobilière (FRI), qui soutient la motion déposée le 14 mars par plusieurs conseillers nationaux issus des Vert'libéraux, du PDC, du PBD, du PLR et de l'UDC. Pour le conseiller. national Olivier Feller (VD/PLR), secrétaire général de la FRI, «l'analyse du FMI est juste, mais il ne faut pas appliquer ses recommandations à la lettre». La motion pro­pose ainsi une voie médiane qui consis­terait à laisser le choix aux propriétaires de garder ou non la valeur locative, ce revenu fictif, en acceptant de ce fait de ne plus déduire les frais hypothécaires. «Ils ne pourraient faire ce choix qu'une seule fois, mais n'importe quand durant la durée de la possession de l'objet immobilier. Cela afin de ne pas pénaliser les jeunes couples ou familles qui renonceraient à sauter le pas si aucune déduction fiscale n'est possible.» Avec ce système, rien ne les empêcherait d'acquérir leur bien selon les règles actuelles, puis, dans un second temps, après dix ou quinze ans, de renoncer à la valeur locative. Ce que les auteurs de la motion ap­pellent le «droit d'option». Cette formule, ajoute Olivier Feller, est plus appropriée que «des  mesures macro­-économiques comme l'augmentation des fonds propres des banques par rapport aux crédits hypothécaires, qui au final ciblent une seule catégorie de la population, la classe moyenne, sous pré­texte de lutter  contre la constitution d'une bulle immobilière».

L'analyse finale du FMI, assortie des commentaires de la FINMA, de la Ban­que nationale suisse, du Secrétariat d'Etat à l'économie, de l'Administration fédérale des finances et des représentants du secteur privé, sera publiée le 8 mai. 

Source : Le Matin dimanche, Yvan Radja